Accoucher en solo

Lorsque nous avons discuté du plan de naissance de notre premier bébé, mon mari m’a immédiatement fait part de sa réserve à assister à l’accouchement, pour des raisons qu’il est inutile de développer ici. La sage-femme qui me suivait s’est montrée, comme à son habitude, très respectueuse de nos décisions. Tout comme elle m’avait fait confiance lorsque j’avais décidé de jeûner un peu pendant le mois de ramadan. Elle s’est montrée compréhensive, indiquant même que les attentes de la société étaient parfois trop fortes envers les hommes à cet égard. Bref, à chacun sa formule gagnante. Mon mari m’avait malgré tout assuré que si sa présence était essentielle à mes yeux, il serait là.

La décision me revenait donc. On m’a suggéré d’être accompagnée par une doula ou par un membre de ma famille. Étant de nature très indépendante et autonome, ces propositions me paraissaient plutôt étranges et me mettaient même un peu mal à l’aise. Le conseil clé est alors venu de la part d’une amie, qui a souligné que je serais probablement tellement concentrée et dans ma bulle au moment de l’accouchement, que je serais peut-être bien mieux toute seule. Il s’avère que si je devais maintenant choisir un seul et unique adjectif pour décrire mon état d’esprit lors de mon accouchement, ce serait celui-là : concentrée. S’il en fallait un deuxième : empowered.

Avance rapide. J’arrive à la maison de naissance le jour J, après avoir passé quelques heures de contractions chez nous, soutenue moralement et soulagée concrètement par mon mari. Comme convenu, il n’a pas assisté à l’accouchement à proprement parler. C’est donc entourée de mes deux sages-femmes que j’ai donné naissance à notre bébé, dans la lumière tamisée et la quiétude d’un dimanche soir d’automne.

Je ne pourrai jamais assez insister sur l’intensité avec laquelle j’ai savouré ces instants d’amour profond.

Je ne saurais dire à quel moment exact mon mari a quitté la pièce, peu après que les « choses sérieuses » aient commencé, mais il était à mes côtés dès les premières secondes de vie de notre enfant. Accoucher « seule » m’a permis de me sentir en confiance et d’être à l’écoute de mon corps et de mes besoins, sans aucune interférence extérieure.

Cette solitude bienveillante s’est poursuivie tout au long de notre première nuit à trois, puis de retour chez nous dès le lendemain de l’accouchement, comme le veut la procédure en maison de naissance.

Nos deux familles vivaient alors à l’étranger et les amis avaient été informés de notre souhait de ne pas recevoir de visites les premiers jours. Je ne pourrai jamais assez insister sur l’intensité avec laquelle j’ai savouré ces instants d’amour profond. Mon bébé, mon mari et moi, dans notre nouveau petit cocon familial.

Malgré les grosses difficultés des débuts de l’allaitement et malgré le manque de sommeil des premières nuits, je me suis appliquée à suivre un autre merveilleux conseil que l’on m’avait donné, des mois auparavant : « Profite de chaque sourire, mais aussi de chaque crise et de chaque pleur, car rien ne dure. » Pour le reste, on faisait en suivant notre instinct.

La visite familiale est arrivée de l’étranger une semaine après mon accouchement, et nous avons alors grandement apprécié l’aide apportée, mais jamais je ne regretterai ces journées de grâce, hors du temps, qui nous ont donné la confiance nécessaire pour assumer notre nouveau rôle de parents. Instants intimes et protégés, que rien ne pourra altérer.

 

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