Devenir parent, c’est se demander ce qu’on veut léguer comme héritage à nos enfants. Je ne parle pas ici d’héritage financier, mais plutôt culturel et religieux. Élever des enfants musulmans au Québec, oui, mais qu’est-ce que cela veut dire exactement et qu’est-ce que cela implique ? En partie, cela implique de mettre les bouchées doubles quand vient le temps de célébrer nos fêtes religieuses. Pour le mois du Ramadan et pour les fêtes du Eid, je sens en moi cette pression de devoir créer des moments mémorables pour mes enfants afin de les éblouir. Pourquoi, me demanderez-vous? Parce que quand toute la ville chantonne dès le 1er novembre Petit papa Noël et que tu te retrouves, quelques mois plus tard, à chanter seule Takbeerat el Eïd, tu te rends assez vite à l’évidence que t’es la minorité dans le coin. Et quelle tristesse que de se rendre compte que ta progéniture comparera constamment ses fêtes à celles de ses camarades de classe.
Ayant grandi dans une famille multiculturelle où les fêtes des trois grandes religions sont honorées, j’ai toujours ressenti ce vide intérieur quand venait le temps de nos célébrations. Pourtant, mes parents avaient tenté le mieux possible de rendre ces journées de fête mémorables, par exemple avec des chasses au trésor pour découvrir nos cadeaux ou des activités comme nous emmener à la Jungle avec nos amis. Ils prenaient aussi soin de décorer la maison, souvent par des objets qu’ils avaient dû confectionner eux-mêmes puisqu’on n’en retrouvait pas vraiment à l’époque, afin de rendre celle-ci digne d’une célébration de l’Eïd. Alors, lorsque je suis devenue maman, j’ai décidé que les fêtes par chez nous seraient célébrées à la manière du bled, comme j’en avais toujours rêvé.
Mon mari et moi avons donc, au fil des ans, instauré des traditions qui nous plaisaient à tous les deux, pour célébrer nos différentes fêtes. Par exemple, chaque année, nous faisons des bricolages sur les thèmes des fêtes avec les enfants afin, entre autres, d’amener la discussion sur les raisons spirituelles derrière celles-ci. Pendant Ramadan, je crée un calendrier de l’Avent, comme pour Noël, afin de faire un décompte avant l’Eïd Al-Fitr. Comme la tradition le veut, nous achetons à toute la famille de nouveaux vêtements, que nous plaçons bien en vue à quelques jours de la célébration afin de bien tenter les enfants. Le matin de l’Eïd, nous allons tous à la mosquée pour Salat el Eïd et nous nous rendons par la suite dans nos familles respectives afin que les enfants reçoivent leurs cadeaux et voient leurs proches. Ce sont là quelques exemples des traditions que nous respectons religieusement (no pun intended) afin que nos enfants attendent avec impatience ces journées de fête.
Pour mon conjoint et moi, il était primordial que nos enfants connaissent et respectent ces fêtes. C’est notre héritage culturel et religieux, c’est qui nous sommes, c’est ce qui nous définit. De plus, vu le multiculturalisme de ma famille, il est encore plus important à nos yeux que nos filles grandissent en fêtant nos célébrations. Il ne faut pas oublier aussi qu’avec tout ce qu’apportent les fêtes célébrées ici, nous avons ressenti l’urgence de rendre nos célébrations encore plus grandioses vu la minorité de notre communauté. Toutefois, mon mari et moi tentons de rendre honneur à notre entourage, surtout les non-musulmans, en les invitant à célébrer avec nous, pour leur ouvrir notre porte et nos cœurs.
Bonne continuité! Si vous cherchez une collaboratrice: je suis intéressée à contribuer.
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