Je ne savais pas trop par où commencer lorsque le temps est venu de choisir le professionnel de la santé qui allait me suivre durant ma grossesse. Les réseaux sociaux n’ont pas su me rassurer sur les médecins spécialisés en suivis prénataux ; je faisais au contraire le constat d’un nombre très élevé de témoignages négatifs à leur sujet. C’est par un heureux hasard, lors d’une de mes nombreuses recherches Internet, que j’ai fait la découverte du site de l’Ordre des sages-femmes du Québec.
Un site qui a eu sur moi l’effet d’une révélation ; non seulement je ne soupçonnais pas du tout l’existence des sages-femmes au Québec, mais je me rendais aussi compte que je ne connaissais absolument rien à leur sujet ! En parcourant le site sans relâche, je me suis rendu compte que les valeurs des sages-femmes venaient rejoindre directement les miennes. C’était en plein ce que je recherchais sans même le savoir.
Des professionnelles spécialistes de la grossesse sans risque et de l’accouchement naturel, avec une approche tout simplement humaine : ces femmes se font une mission d’accompagner les futures mamans individuellement en leur offrant respect, écoute et soutien. Les sages-femmes n’hésitent pas à répondre aux craintes et incertitudes des femmes tout en tenant compte des valeurs et préférences de chacune. Elles tiennent aussi absolument à cultiver une relation de confiance avec leurs patientes et à leur attribuer un rôle actif en permanence, entre autres en leur permettant de prendre des décisions éclairées tout au long de leur grossesse, puis de s’approprier la naissance de leur enfant lors de l’accouchement.
Leur philosophie me paraissait si belle et humaine que désirais plus que tout poursuivre ma route avec les sages-femmes et accoucher en maison de naissance. Mon conjoint m’a cependant rapidement ramené les deux pieds sur terre, ne partageant pas du tout mon enthousiasme.
«Il espérait que je change d’avis avec le temps »
Ma proposition lui semblait étrange et hors-norme; nous ne connaissions aucune femme ayant suivi un cheminement semblable. Il faut dire que les sages-femmes étaient très peu connues dans mon entourage de près comme de loin. Ce n’était pourtant pas une raison pour écarter complètement l’idée ! Après avoir réservé ma place auprès d’une sage-femme, j’ai donc tenu à ce que nous assistions à une séance d’information ayant lieu à la maison de naissance de l’Ouest-de-l’Île, ce qui a permis à mon conjoint d’en apprendre davantage sur le sujet. Il était toujours sceptique, et espérait secrètement que je change d’avis au fil du temps.
Bien au contraire ! Plus le temps passait, plus j’étais à l’aise avec ma décision. Les propos de mon conjoint ont alors changé de teneur : oui pour la sage-femme, mais pas en maison de naissance. Il voulait que j’accouche à l’hôpital, trouvant cet endroit plus rassurant en cas d’urgence. De mon côté, je souhaitais particulièrement accoucher en maison de naissance puisque le lieu me semblait beaucoup plus accueillant et convivial, et le contexte favorisant l’accouchement physiologique.
Vers la fin de la grossesse, nous avons assisté à des cours prénataux donnés par les sages-femmes, des cours qui se sont révélés être à la fois instructifs et rassurants, autant pour moi que pour mon conjoint. À ma grande surprise, c’est à travers ces cours que la perspective de mon conjoint face au travail des sages-femmes commençait ENFIN à changer. C’était sa révélation à lui ; il saisissait leur philosophie, il adhérait à leurs valeurs, et à un mois de l’accouchement, il a finalement décidé de me faire confiance dans mon choix d’accoucher en maison de naissance, accompagnée par des sages-femmes.
« Je croyais vivre un cauchemar »
Nous sommes arrivés à l’aube à la maison de naissance. Mon conjoint et moi ressentions alors un mélange d’excitation et d’anxiété face à ce qui nous attendait, mais la sage-femme qui nous a accueillis nous a instantanément rassurés avec son sourire accompagné de sa voix douce et chaleureuse. Elle m’a ensuite soutenue et accompagnée tout au long du travail qui progressait relativement bien.
Vers 21 heures, le tourbillon des contractions commençait à s’essouffler car elles n’étaient plus très efficaces. Cela faisait près de trois heures que la dilatation était stagnée à neuf centimètres ; le bébé n’était pas bien positionné et moi j’étais tout simplement à bout. Comme plus rien ne m’aidait à avancer, les sages-femmes ont fini par convenir que je devais être transférée à l’hôpital. Je croyais vivre un cauchemar.
Étant donné que c’était un transfert de soins, les sages-femmes ne pouvaient plus intervenir dans les décisions. Elles m’ont toutefois accompagnée et n’ont cessé de me soutenir émotionnellement. Une fois rendue à l’hôpital, je voyais bien que ce n’était qu’une question de temps avant que l’équipe médicale juge nécessaire d’y aller d’une intervention médicale. Je voyais déjà les ventouses et les forceps installés sur une table devant moi.
C’était en plein état d’alerte que je repensais à tout ce que les sages-femmes m’avaient préalablement transmis quant à l’attitude à adopter pendant le travail. Toute cette préparation mentale a soudainement recommencé à porter ses fruits. J’ai décidé de garder espoir et d’avoir confiance en moi ainsi qu’en ma capacité à donner naissance seule. J’ai décidé de reprendre le contrôle sur moi-même et d’aller puiser l’énergie jusqu’au plus profond de mon être, là même où je croyais ne plus en avoir. J’ai décidé de ne pas lâcher le bout du bâton, et cela m’a permis de reprendre le dessus sur mon accouchement, sans intervention médicale, comme je le souhaitais.
« Les sages-femmes m’ont permis de croire en moi »
Le fait d’avoir changé d’environnement a contribué à relancer mes contractions mais cela n’était pas suffisant. Pour que le travail avance vraiment, il me fallait cette force intérieure que je n’aurais jamais douté posséder en moi sans ma rencontre avec les sages-femmes. Grâce à elles et leur soutien émotionnel inégalable, je me suis sentie outillée pour faire face à cette épreuve dont le processus est bien plus mental que je n’aurais su l’imaginer. Elles m’ont permis de croire en moi lorsque j’en avais le plus besoin. Ainsi, même si je ne voyais pas toujours le bout du tunnel, la confiance, l’espoir et la force d’esprit m’ont guidées jusqu’à la toute fin.
À minuit quarante minutes, notre fille était enfin avec nous. Après la naissance, nous retournions tous ensemble à la maison de naissance, et les sages-femmes ainsi que les aides-natales, tant avant et bien après avoir obtenu notre congé, n’ont cessées de nous accompagner de façon inestimable dans cette nouvelle aventure que représentait le post-accouchement.
Choisir les sages-femmes et la maison de naissance étaient parmi les meilleures décisions de ma vie. Si c’était à refaire, je ne changerais rien. Je choisirais encore les sages-femmes et encore la maison de naissance, et ce même si mon accouchement, cette fois-ci, s’est terminé à l’hôpital.
Magnifique témoignage qui n’est que justice pour le travail extraordinaire accompli par les sages-femmes. Je me souviens avoir lu quelque part (dans le livre d’isabelle Brabant je crois) que les femmes qui accouchent naturellement arrivent toutes à un stade où elles pensent qu’elles n’en peuvent plus, qu’elles vont lâcher, etc. Et c’est justement le signe, en général, que la fin approche et qu’elles trouvent alors une énergie insoupçonnée pour la dernière poussée. J’ai aussi vécu ce moment pendant mon accouchement et je me suis souvenue de ces quelques mots, j’ai poussé de toutes mes forces, et bébé est sorti! Il ne faut jamais négliger notre force psychologique.
Merci beaucoup : ) Oh mon dieu oui je me souviens de cette énergie! Quoique je l’ai ressenti assez tardivement haha. Je crois effectivement que beaucoup se passe dans la tête. J’ai aussi lu «Une naissance heureuse» d’Isabelle Brabant qui est un livre tout simplement magnifique que je conseille à toutes les futures mamans d’ailleurs!
On est tellement privilégiée d’avoir accès au suivi sage-femme. D’ailleurs, pour celles qui le préfèrent, elles peuvent choisir d’accoucher à l’hôpital avec leur sage-femme. J’ai dû avoir une césarienne car bébé se présentait par les pieds. Malgré cette situation j’ai pu avoir ma sage-femme qui m’a accompagné en salle d’opération (mon amoureux aussi) et j’ai pu garder le suivi sage-femme postpartum : l’équipe est venu à la maison à plusieurs reprises durant le mois suivant l’accouchement. C’est un service exceptionnel durant et après la grossesse. Pour le bébé suivant, il n’y a aucun doute que je choisirai à nouveau le suivi sage-femme (et probablement un accouchement à l’hôpital). ♥
Oui, j’aime beaucoup le fait que les sages-femmes donnent la possibilité à leurs patientes de choisir le lieu de naissance et qu’elles respectent totalement leurs décisions, sans jugement. Que ce soit d’accoucher à l’hôpital ou même de prendre l’épidurale, le choix appartient à la future maman, point. Et en effet, on peut vraiment qualifier le service d’exceptionnel! Je suis contente que tu aies eu une belle expérience avec les sages-femmes malgré la césarienne. Je suis certaine que leur présence et leur soutien a dû être inestimable à tes yeux, autant avant qu’après la naissance! Cette épreuve est assez difficile en soi et être bien accompagné durant le post-accouchement peut vraiment faire une grande différence. 😉
La plus belle surprise pour moi, c’était d’apprendre l’existence des maisons de naissance ici au Québec, lorsque ma femme m’en a parlé. Ca nous a paru tellement évident de choisir cette option je pense qu’on n’y pas pas réfléchi plus que 2 minutes! La même philosophie qui a accompagné ma propre mère dans tous ses accouchements (à la maison, dans mon pays d’origine), y compris dans l’aménagement des chambres (comme le tissus accroché au plafond par exemple). Bref, pas vraiment de dépaysement en ce qui me concerne 😉
Waw c’est vraiment intéressant! Merci de partager ton point de vue en tant que conjoint : ).
❤ Ça me touche beaucoup, les mots sont si justes !
Merci beaucoup de m’avoir lue Karianne : ).
Merci pour ce témoignage Noura. Je suis particulièrement heureuse d’avoir pu participer à cette découverte de ta force de femme et de mère. Bonne continuation dans ta vie de mère, dans votre vie de parents.
isabelle brabant
Merci beaucoup pour vos bons mots Isabelle, ca me fait chaud au coeur de lire votre message. Entres-autres grâce à votre livre (que les sages-femmes m’ont permis de découvrir), je suis passée à travers cette aventure avec énormément de confiance et de sérénité, ce qui n’a pas de prix et que je souhaite sincèrement à toutes les futures mamans! J’en profite pour vous remercier de faire une différence dans notre société et de contribuer à faire changer les perceptions, peu à peu, chaque jour!