Le 21 octobre 2016. Après deux ans de larmes, d’incompréhension, de tests négatifs… Enfin, les deux lignes sont apparues. Je suis enfin enceinte ! Je n’en croyais pas mes yeux. Pour être certaine, j’ai refait à treize reprises le fameux test de grossesse. Et oui, pas une, mais bien 13 fois ! Les résultats étaient toujours les mêmes : positifs. J’avais enfin une vie qui grandissait à l’intérieur de moi.
La famille, les amis et les collègues, tout le monde était heureux pour moi. Tout le monde y allait de conseils : profite maintenant. Dors, car une fois que le bébé sera là, tu ne dormiras plus.
J’avais attendu deux ans pour avoir ce bébé… le sommeil était le dernier de mes soucis. J’étais prête à rester debout dix-huit ans s’il le fallait.
Le 22 juin 2017, je donnais naissance à ma princesse. Après les premiers jours d’euphorie…. arrive le baby blues. L’allaitement qui ne marche pas super bien. Bébé qui se réveille toutes les deux heures. Les visites de la famille. Tout le monde a son mot à dire sur la façon dont tu habilles ton nouveau-né (alors qu’il fait 40 degrés dehors). Personne n’est vraiment méchant… mais bébé a un mois et tu as dormi environ 8 heures en 3 semaines. Mais c’est pas grave ! Tu as tellement attendu longtemps pour avoir ce bébé. Tu es prête à tout.
Tu lis sur des méthodes de sommeil qui parlent de laisser le bébé pleurer… Tu juges ces mamans qui utilisent ces techniques… voyons donc. T’as fait un enfant pour t’en occuper… Tu vas pas le laisser pleurer.
Mais les cernes arrivent et s’établissent sur ton visage. Le moral baisse. Papa retourne au travail et tu te retrouves seule face à ce bébé que tu aimes tellement, mais qui ne dort pas. Elle fait des siestes de trente minutes, alors pas moyen de fermer l’œil durant le jour. Oublie la douche ou le ménage. Heureusement que le déodorant et le shampoing sec existent. Tu gardes espoir, car tout le monde te jure haut et fort que bébé va finir par faire ses nuits vers ses trois mois. Tu vas voir.
Bébé a plus de trois mois et elle se réveille toujours toutes les deux heures. Tu pleures tout le temps. Tu l’aimes ce trésor, mais tu ne vois plus la lumière au bout du tunnel. Tu te sens tellement seule. Tes amies te disent que ça va aller mieux. Elle va finir par faire ses nuits. Tu gardes toujours espoir.
Tu n’as plus d’énergie. Les disputes avec ton mari augmentent, car tu lui en veux… de quoi ? Tu ne sais pas. Il t’aide pourtant. Il fait le ménage. Il cuisine. Il s’occupe d’elle le soir. Il t’aime tellement. Mais toi t’en peux plus. Tu en veux à la petite de ne pas dormir. Tu t’en veux, toi, mère indigne, incapable de supporter ton bébé. Le médecin te suggère des antidépresseurs. Non, un instant. Et là, tu réalises… Je voulais tellement ce bébé… Pourquoi suis-je égoïste ?
Tu entends parler d’une conseillère en sommeil, une « Sleep consultant ». Tu lis les commentaires sur son site et tu es impressionnée. Elle semble être la gourou du sommeil. C’est ton dernier espoir. Elle coûte cher, mais rendu là…. faut sauver ta santé, fille.
Oui, j’ai fait affaire avec une experte en sommeil. J’ai honte de le dire, mais je le dis quand même, car elle a sauvé ma santé mentale, mon mariage et le sommeil de mon bébé. Après trois jours intenses à écouter ses conseils… bébé dort enfin ! Oui… j’ai dû laisser pleurer mon bébé. Oui, on m’a jugé. Ma famille est égyptienne et il y a beaucoup de tabous… Alors seule ma mère est au courant que j’ai fait affaire avec une experte et que j’ai osé laisser mon bébé pleurer. Ma mère, qui était au début pas trop d’accord avec cette méthode, me dit aujourd’hui à quel point mon bébé rayonne de joie. En deux semaines, elle a tellement changé. Elle rit et gazouille de plus en plus fort. Elle sourit tout le temps !
Est-ce que c’était difficile ? Mon Dieu. Encore plus que l’accouchement. Sans mon mari, ma mère, mes amies, je n’aurai pas pu passer au travers. Mon cœur se brisait en mille miettes. J’ai pleuré autant que mon bébé, sinon plus, les yeux rivés sur le moniteur pour la surveiller. Mais mon mari me répétait tout le temps : « Ne t’inquiète pas. Elle va bien. C’est pour son bien que l’on fait ça ».
Je te parle à toi, maman fatiguée qui se réveille encore toutes les deux heures pour nourrir ton bébé de quatre, cinq, six, voire neuf mois. Je te vois. Tu souffres tellement, mais tu ne sais pas quoi faire.
Demande de l’aide. Si les consultantes en sommeil existent, c’est qu’il y a une demande. Renseigne-toi. Tu vas devoir laisser bébé pleurer et c’est bien correct ! Tu vas entendre des gens dire « Non, un bébé, ça ne doit pas pleurer ». Faux. Un bébé de quatre mois et plus, qui se réveille encore toutes les deux heures, tous les jours, est un bébé qui manque cruellement de sommeil et qui n’a pas nécessairement faim. C’est un bébé qui s’est habitué aux bras de maman et qui a besoin d’un coup de main pour apprendre à dormir. C’est comme faire du vélo… Tu sais que les premières fois, ton enfant va tomber et va peut-être se faire mal. Mais tu le fais quand même, car il doit apprendre. Mais tu es là pour l’accompagner et lui apprendre. C’est la même chose pour dormir. Les bébés ont besoin d’apprendre à dormir. Ils ont besoin d’une routine. Et surtout…. Ils ont besoin d’une maman heureuse. Alors oui, j’ai laissé mon bébé pleurer et elle se porte très bien. Et aujourd’hui, nous sommes tous plus heureux.