J’ai passé les cinq premières années de ma vie en Algérie, dans un environnement où tout le monde me parlait en arabe. Puis, mes parents ont immigré au Québec au début des années 90 et n’ont pas eu le choix de m’inscrire à l’école en français. Ça tombait bien : une des raisons pour lesquelles le Québec avait ouvert l’immigration aux Maghrébins était justement parce qu’ils provenaient de pays francophones.
J’avais cinq ans et je ne parlais pas un mot de français, c’était donc direction classe d’accueil. Mes parents, dans le but d’accélérer mon apprentissage, ont aussi commencé à me parler dans la langue de Molière. Tout à coup (enfin, j’imagine que cela a pris quelques temps et sans le réaliser vraiment) la langue parlée à la maison est devenue petit à petit le français. Pendant plusieurs années, c’était direction le bled durant les vacances d’été pour nous remettre dans le bain. Ce retour aux sources me permettait de pratiquer ce qui me restait comme connaissances de l’arabe. J’ai eu la chance aussi d’avoir des cousins de mon âge et je vivais, grâce à eux, une vraie immersion. Heureusement pour moi, c’était l’époque où les enfants jouaient encore dehors et inventaient des histoires. Je n’avais pas d’iPad et d’autres bébelles technologiques. Pas le choix de me forcer à leur parler, sinon l’été allait être long.
Pour m’inculquer une base en arabe littéraire, mes parents ont essayé de trouver des cassettes vidéo de dessins animés en arabe, mais le choix restait restreint. J’ai aussi fait six ans d’école du samedi, ce n’était pas évident, car le dialecte des professeurs était différent du mien. Tant bien que mal, j’ai appris à lire et à écrire mon nom. J’exagère, j’ai appris la base, je dirais que mon niveau est celui d’un élève de la troisième année du primaire.
Aujourd’hui, je comprends très bien le dialecte algérien et je suis capable de tenir une conversation pas trop intellectuelle. Dès que j’en ai la chance, je vais par réflexe changer vers le français, car je n’ai pas besoin de chercher mes mots. Lorsque je vois des vidéos de moi à quatre ans jacassant comme une pie en arabe, ça me désole de constater à quel point je parlais de manière fluide et naturelle. J’ai clairement perdu cette aisance et ça m’amène souvent à une grande incertitude lorsque je dois répondre à la question «langue maternelle ?» Chaque fois que je tombe sur ce choix dans un formulaire, j’hésite toujours un moment. Puis, un peu malgré moi, je réponds «français». Oui, c’est vrai que selon Statistiques Canada la «langue maternelle est la première langue apprise à la maison dans l’enfance et encore comprise par la personne…» Mais d’après moi, la langue maternelle c’est plus que ça : c’est la langue avec laquelle on se sent le plus à l’aise. Et d’aussi loin que je me souvienne, le français est la langue avec laquelle je m’exprime, pense et rêve.
Ayant maintenant mon propre enfant, je fais mon possible pour lui transmettre l’arabe. Ça me faisait très bizarre au début d’utiliser une langue quotidiennement que j’utilisais très rarement auparavant. Il m’arrive même de ne pas connaitre un mot et de devoir demander à ma mère ou bien de le rechercher sur Google avant de l’inculquer à mon fils. Pour moi, c’est important de lui transmettre cet héritage. Je veux qu’il soit capable de prononcer des lettres et des sons qui n’existent pas dans les langues latines. Je suis vraiment consciente de la difficulté de conserver une langue plus que minoritaire dans un environnement déjà bilingue. Malgré tous les efforts que j’y mets, je sais que ce sera difficile de maintenir cette cadence quand il commencera l’école. Je vais faire mon possible et seul l’avenir nous dira quelle langue il inscrira à la fameuse question «langue maternelle?»
Moi ma « langue maternelle » c’est l’anglais, malgré avoir grandit dans une maison arabe et avoir fait 12 ans de scolarité en français, dans une ville francophone. Pour une raison ou une autre je suis beaucoup plus à l’aise en anglais (parler, écrire, penser, rêver)! Je trouve ça vraiment dommage étant donné que l’anglais c’est quand même une langue assez… plate! Je parle français à mon fils et mon mari lui parle en allemand. J’ai aucune idée où il va apprendre son arabe mais nous on est pas assez à l’aise avec la langue. Merci pour cet article et bonne chance avec ton fils!
J’ai entendu dire que l’un des critères les plus fiables pour déterminer sa langue maternelle était de se demander dans quelle langue on calcule 😉
Il parait que le critère le plus fiable pour déterminer la langue qui correspond à notre langue maternelle, c’est de se demander dans quelle langue on calcule 😉
Alors moi c’est clairement le français :O
Ça fait 4 ans que je suis ici , pas beaucoup , donc ma langue maternelle c’est l’arabe parfois j’ai trouve des difficultés à m’exprimer en français car dans ma tête je pense en arabe . Mais mon fils de 3 ans ne parle que le français en plus il refuse de regarder des dessins animés en arabe soit en englais ou en français . Il est même capable de distinguer entre les deux langues par example il me dit « thank you » c’est un mot anglais « merci » français … J’aime bien qu’il apprenne l’arabe comme ça il sera trilingue inshallah pourquoi pas ! Les filles qui n’ont pas ce problème et leurs enfants parlent bien l’arabe donnez nous des astuces s’il vous plaît 🙂
Je trouve *