Comme un bus qui vous rentre dedans

Lorsqu’on m’a contacté pour faire partie de l’équipe d’Olive et Érable, j’ai tout de suite pensé que mon premier article devrait être positif, informatif, qu’il devrait propager la bonne parole en quelque sorte. Je voulais parler de parentalité positive, de communication non violente et de bienveillance. Je voulais parler d’attachement, d’amour et d’écoute. C’est ce que je voulais faire… Néanmoins, le texte ne sonnait pas comme je le voulais. Le contenu restait technique, sans âme… Non pas que je n’y crois pas, bien au contraire ; je ne jure que par cela ! C’est plutôt parce qu’il y avait quelque chose de plus profond, de plus vrai et de plus authentique que je voulais partager.


Il y a de ces choses dans la vie qui vous arrivent, qui bousculent votre réalité, qui vous déséquilibrent… Vous êtes en suspens, vous avez perdu pied, vous n’avez plus aucun repère. Comme un bus qui te rentre dedans, ma fille est arrivée dans ma vie et elle a chamboulé mon monde.

La naissance de ma fille a coïncidé avec la naissance de la mère en moi. Ce rôle je l’avais imaginé, planifié. Tout était organisé, mes douze mois de maternité visualisés et assez bien documentés. Je voulais être une maman maternante, allaitante et bienveillante. Ce qui n’était pas prévu, c’est que ce rôle me remette face à ma propre enfance, mes propres peines, mes propres frustrations et mes propres besoins d’affection inassouvis.

J’ai alors réalisé à quel point j’avais besoin de ma mère. Cette mère douce chaleureuse indulgente, attentive, et surtout sans jugement. Cette mère que j’aurais voulu avoir. En fait, ma relation avec ma mère est tumultueuse. Ma maman est une femme extrêmement généreuse, qui a toujours voulu aider les gens autour d’elle et qui est profondément guidée par de bonnes intentions. Pourtant, pour une raison encore inconnue, je crois qu’entre elle et moi ça n’a jamais vraiment cliqué. Je ne sais pas quand c’est arrivé, mais une distance s’est installée entre nous. Je n’ai plus confiance… en elle.

Cette relation difficile a produit une femme — moi, en l’occurrence — sans aucune confiance ni en elle ni en quiconque ; elle s’attend à être trahie n’importe quand et par n’importe qui. Cette relation a produit une femme qui doute de toutes ses actions, qui se remet constamment en question, qui estime ne pas mériter ni attention ni amour, qui est noyée de culpabilité.

Je sais que ma mère a agi avec de bonnes intentions. En discutant avec une amie de la famille sur ce sujet, nous en sommes arrivées à la conclusion que chaque parent fait le meilleur de lui-même et pense donc donner le meilleur à ses enfants… Et ça, j’y crois. Toutefois, je crois aussi que chaque enfant est différent. À sensibilité différente, besoins différents. Faire la paix avec mon passé et toutes mes réalisations a été difficile. C’est d’ailleurs cette introspection qui m’a ouvert les yeux sur l’importance de la mère. C’est le secret de mon penchant et de ma décision d’enrober ma famille de bienveillance et d’amour: de parentalité positive.

Maintenant que la table est mise et que la base est solide, je pourrais sans aucun problème parler des formalités de la parentalité bienveillante telle que je la vis, telle que je la vois. Pour moi, la clé est l’amour inconditionnel et le don de soi. Ce texte est aussi un message à l’amour de ma vie, à ma raison d’être : je ferai tout en mon pouvoir pour l’aider à se bâtir et se construire. Je vais la guider et la soutenir à travers les tumultes et les péripéties jusqu’à l’âge adulte. Je promets que je ferai tout ce qui est en mon pouvoir avec la plus grande volonté du monde pour l’aider à s’épanouir et à devenir une adulte saine, accomplie et équilibrée.

J’aimerais qu’elle soit passionnée, généreuse, bienveillante, heureuse, spirituelle, amoureuse de Dieu et de la vie, artistique, philosophe et scientifique. Pas nécessairement dans cet ordre, mais certainement tout cela à la fois. J’aimerais qu’elle soit bien plus que ce que j’ai pu être et devenir. Et pour ce faire, je lis tout ce que je peux sur les dernières études scientifiques, les dernières recherches cliniques sur la neuropsychologie de l’enfant et de l’adulte. Je suis mon instinct dans ce monde, alors que je suis littéralement bombardée d’informations contradictoires. Je suis mon instinct, la peur au ventre.

Je l’aime plus que tout au monde. J’aimerais lui redonner ce cadeau inestimable qu’elle m’a fait en me choisissant comme compagne de route. Elle m’a permis de faire face à mes peurs et à mes blessures les plus profondes. J’ai sombré, profondément, longtemps… Et finalement, je renais, petit à petit.

Je rends grâce à Dieu tous les jours, pour ce don que la vie m’a donné, même les jours où je ne me rappelle plus pourquoi. Cette deuxième chance de suivre mon cœur avec mon cœur à mes côtés. Merci, mon Dieu, pour votre infinie bonté ; merci de m’avoir donné la force et la volonté de changer. Merci de m’avoir donné un compagnon qui a su voir à travers la noirceur ses propres manquements.

Le bus nous est effectivement rentré dedans. Il nous a mis en morceaux pour nous permettre de mieux nous reconstruire, plus solides et surtout plus unis.

Être parent ce n’est certainement pas facile, mais c’est indéniablement magique !

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